- humanité
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• 1120; lat. humanitas1 ♦ Philos., théol. Caractère de ce qui est humain, nature humaine. Humanité et divinité de Jésus-Christ. La part d'humanité et d'animalité en chaque homme.2 ♦ Cour. Sentiment de bienveillance envers ses semblables, compassion pour les malheurs d'autrui. ⇒ bonté, pitié, sensibilité. Sentiment, geste d'humanité. Traiter un coupable, un prisonnier avec humanité. Faire preuve d'humanité.3 ♦ (1485, rare av. XVIIe) Cour. Le genre humain, les hommes en général. ⇒ homme, humain. L'humanité tout entière. L'humanité souffrante. Un bienfaiteur de l'humanité (⇒ philanthrope) . Passé, histoire de l'humanité. ⇒ civilisation. Patrimoine de l'humanité. Crime contre l'humanité. « l'humanité s'est définitivement émancipée » (Renan). « L'humanité n'a adoré que ceux qui la firent périr » (Cioran).4 ♦ (déb. XVIe studia humanitatis, du lat. class. humanitas « culture ») Au plur. Didact. et vieilli Étude de la langue et de la littérature grecques et latines. Faire ses humanités. — Langue et littérature grecques et latines. L'étude des humanités gréco-latines. — Études classiques, littéraires, philosophiques.♢ (Belgique) Études secondaires (classiques, modernes ou techniques).5 ♦ Caractère d'une personne en qui se réalise pleinement la nature humaine. L'amour suscite « une source vive d'humanité » (Chardonne).⊗ CONTR. Inhumanité, méchanceté.Synonymes :- bonté- charité- clémence- générosité- miséricorde- pitié- sensibilitéContraires :- bestialitéhumanitén. f.rI./rd1./d Nature humaine. Humanité et divinité du Christ.d2./d Genre humain. Rendre service à l'humanité.d3./d Altruisme, bienveillance à l'égard des autres. Traiter qqn avec humanité.d4./d Sentiment profond de la grandeur et de la misère de l'homme. Les oeuvres d'Eschyle sont pleines d'humanité.rII./r Plur. (Belgique, Afr. subsah.) études secondaires. (V. secondaire inférieur, supérieur.)⇒HUMANITÉ, subst. fém.I. — Au sing.A. — Caractère de ce qui ou de celui qui est humain.1. [Correspond à humain I B] Ensemble des caractères spécifiques de la nature humaine. La divinité et l'humanité du Sauveur nous apparaissent également unies (MONOD, Sermons, 1911, p. 296). Les seuls comportements humains qui s'éloignent de notre native humanité et qui la trahissent (J. VUILLEMIN, Essai signif. mort, 1949, p. 194) :• 1. ... vous autres, vous seuls, vous avez vu, vous avez touché, vous avez saisi ce corps humain dans son humanité, dans notre commune humanité, marchant et assis sur la terre commune...PÉGUY, Myst. charité, 1910, p. 56.— En partic. [Avec une intention valorisatrice, p. oppos. aux espèces animales voisines] Cette lutte éternelle et indispensable entre notre humanité et notre animalité (COMTE, Philos. posit., t. 1, 1839-42, p. 504).2. [Correspond à humain I C 1] Caractère d'une personne (ou de son comportement) qui manifeste pleinement son appartenance au genre humain. Il y a chez ce faible roué, si dénué de caractère, une humanité qui est le secret de sa faiblesse (MAURIAC, Bloc-notes, 1958, p. 172) :• 2. C'est par ce côté, par le moyen de cette gesticulation précise qui se modifie avec les époques et qui actualise les sentiments que l'on peut retrouver la profonde humanité de leur théâtre.ARTAUD, Théâtre et son double, 1939, p. 129.3. [Correspond à humain I C 2] Bonté, bienveillance de l'homme pour ses semblables. Acte, œuvre d'humanité; manquer d'humanité. Les tortures et autres barbaries, contraires à l'humanité (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 267) :• 3. Il est conforme d'autre part aux sentiments d'humanité et de bienveillance, fruits de l'adoucissement des mœurs, de ne pas punir des enfants innocents pour le crime de leur père.COURNOT, Fond. connaiss., 1851, p. 404.B. — Ensemble des hommes, du genre humain, parfois considéré comme constituant un tout, un être collectif. Il faut sauver l'humanité et la civilisation à tout prix (RENAN, Avenir sc., 1890, p. 326) :• 4. Qui dit homme dit humanité.L'homme porte en lui l'humanité.L'homme n'existe pas indépendamment de l'humanité.Perfectionner l'homme, c'est perfectionner l'humanité.Perfectionner l'humanité, c'est se perfectionner soi-même.P. LEROUX, Humanité, t. 1, 1840, p. 269.SYNT. Âge, amour, histoire, mémoire, origine, progrès de l'humanité; humanité douloureuse, souffrante; être au ban de l'humanité.II. — Au plur.A. — Formation scolaire où l'étude des langues et littératures latines et grecques, considérées comme particulièrement formatrices, est prépondérante. Dans tout le cours de ses humanités, Descartes fut un élève modèle (VALÉRY, Variété V, 1944, p. 212).— En partic. ,,Classes, dans les collèges et les lycées, comprenant l'enseignement au-dessus de la grammaire jusqu'à la philosophie exclusivement, et dites aujourd'hui classes de lettres`` (LITTRÉ). C'est qu'autrefois, la classe chic des humanités françaises était la classe de rhétorique, la classe des élèves promus à un grand avenir et des professeurs en vue (GONCOURT, Journal, 1891, p. 94).♦ Faire, finir ses humanités. Quand j'eus fini mes humanités, mon père me laissa sous la tutelle de Monsieur Lepître (BALZAC, Lys, 1836, p. 16) :• 5. ... ils tiennent M. Zola en petite estime littéraire et le renvoient à l'école parce qu'il n'a pas fait de bonnes humanités et que peut-être il n'écrit pas toujours parfaitement bien.LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 267.B. — Contenu de cet enseignement. Après avoir étudié les humanités chez les Jésuites de Dijon (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 89). Dans cinquante ans, il n'y aurait plus en France d'humanités latines (GONCOURT, Journal, 1887, p. 659).— P. ext. [Dans d'autres domaines que dans les lang. et litt. class.] Humanités modernes et enseignements démocratiques ont été couplés comme deux termes corrélatifs (THIBAUDET, Réflex. litt., 1936, p. 250).Prononc. et Orth. : [ymanite]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. 1. 1119 humanitet « ensemble des caractères qui constituent la nature humaine » (PH. DE THAON, Comput, 1553 ds DG); 2. ca 1170 humanited « sentiment de bienveillance, de compassion » (Rois, éd. E. R. Curtius, p. 113); 3. ca 1450 humanité « ensemble des hommes » (Mystère du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, t. 1, p. 54, 1318); 4. av. 1615 humanité « les lettres classiques » (E. PASQUIER, Les Recherches de la France, éd. 1665, p. 343); 1671 au plur. (POMEY). Empr. au lat. humanitas, attesté aux sens 1 et 2, ainsi qu'au sens de « culture générale de l'esprit » dès l'époque class., dér. de humanus (humain). Fréq. abs. littér. : 7 254. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 10 923, b) 8 113; XXe s. : a) 13 097, b) 9 304. Bbg. DUB. Pol. 1962, p. 317. - HUS (A.). Doctor, doctrina et les mots de sens voisins en lat. class. R. Philol. Litt. Hist. anc. 1974, t. 48, n° 1, pp. 35-45. - JAN (E. von). Humanité. Z. fr. Spr. Lit. 1932, t. 55, pp. 1-66. - LAUNAY (M.). Le Vocab. pol. de J.-J. Rousseau. Genève-Paris, 1977, pp. 115-116. - MAULNIER (Th.). Le Sens des mots. Paris, 1976, pp. 107-108. - SCHALK (F.). Zur Bedeutungsgeschichte von humanité. N. Spr. 1932, t. 40, pp. 224-235.humanité [ymanite] n. f.ÉTYM. 1120, humaniteit; lat. humanitas, de humanus. → Humain.❖1 a Philos., théol. Caractère de ce qui est humain, nature humaine. || Humanité et animalité (cit. 3) de l'homme. || Humanité et divinité de Jésus-Christ (→ Glorieux, cit. 19). || Toute humanité s'était effacée de cette bouche exsangue (cit. 4).1 Donc(ques), si de parler le pouvoir m'est ôté,Pour moi, j'aime autant perdre aussi l'humanité,Et changer mon essence en celle d'une bête.Molière, le Dépit amoureux, II, 6.2 (…) son Humanité glorieuse (de Jésus) réside dans les Tabernacles de l'Église, sous les espèces du Pain qui le couvrent visiblement (…) sachant que nous sommes grossiers, il nous conduit ainsi à l'adoration de sa Divinité présente en tous lieux par celle de son Humanité présente en un lieu particulier (…)3 (…) cette humanité qui est commune à tous les hommes sous l'inégalité de leurs rangs et de leurs états.Julien Benda, la Trahison des clercs, p. 169.4 (…) il peut arriver à n'importe lequel d'entre nous, fût-il d'ailleurs prince ou évêque, de se trouver brusquement face à face avec la Sainte Humanité du Christ, car le Christ n'est pas au-dessus de nos misérables querelles—à l'exemple du Dieu géomètre ou physicien—il est dedans, il s'est revêtu de nos misères, nous ne sommes pas sûrs de le reconnaître du premier coup.Bernanos, les Grands Cimetières sous la lune, p. 216.b Anthropol. Caractère humain. || « Les critères fondamentaux de l'humanité » (→ Outil, cit. 2.1, Leroi-Gourhan).2 (V. 1170, humanited; correspond à humain I., 2.). Cour. Sentiment de bienveillance envers son prochain, compassion pour les malheurs d'autrui. ⇒ Bienveillance, bonté, charité, compassion, pitié, sensibilité; → Amour, cit. 50; grandeur, cit. 22. || L'humanité de qqn, d'un acte, d'une réaction. || Sentiment d'humanité (→ Effacer, cit. 11), mouvement, geste d'humanité (→ Générosité, cit. 6). || Un homme plein d'humanité, qui comprend ses semblables, fait le bien (→ Philanthrope). || Siècle sans humanité (→ Fer, cit. 8). || Traiter un coupable, un prisonnier avec humanité. ⇒ Clémence (cit. 4), douceur, indulgence; humainement.5 Un loup rempli d'humanité(S'il en est de tels dans le monde)La Fontaine, Fables, X, 5.6 Hommes, soyez humains, c'est votre premier devoir (…) Quelle sagesse y a-t-il pour vous hors de l'humanité ?Rousseau, Émile, II.7 Mais il y avait, chez cet homme (Bonaparte), qui passait pour dur, une profonde humanité qui, chez lui, tempérait cette aspiration à l'autorité et qui, en particulier, le portait à se préoccuper beaucoup des « droits » des enfants, particulièrement des mineurs.Louis Madelin, Hist. du Consulat et de l'Empire, Le Consulat, XII, p. 193.3 Caractère d'une personne en qui se réalise pleinement la nature humaine. ⇒ Humain (I., 3.). || La riche humanité qui se révèle chez un homme, une femme; qui caractérise un héros de roman.8 Ce n'est pas l'intensité du sentiment qui est favorable à l'individu, mais l'amour, lien du couple, parce qu'il met face à face deux êtres vite dénudés, et suscite des exigences utiles, des tourments indispensables, une source vive d'humanité. Celui (…) qui est approuvé au dehors, vient échouer devant une femme (…) elle réclame un être réel. Alors l'homme s'aperçoit (…)J. Chardonne, l'Amour du prochain, II, p. 28.4 (V. 1450; rare av. XVIIe). Cour. (L'humanité). Le genre humain, les hommes en général. ⇒ Homme, humain. || L'humanité et l'individu (→ Bienveillant, cit. 3). || L'humanité entière (→ Absolu, cit. 16). || Épreuves (cit. 23 et 29), souffrances de l'humanité. || L'humanité souffrante (→ Gueux, cit. 2). || Pour l'amour (cit. 4) de l'humanité. || Se dévouer au service de l'humanité (→ Anachorète, cit. 2). || Bienfaiteur de l'humanité. || Le savoir, patrimoine de l'humanité (→ Flambeau, cit. 13). || Défendre la cause (cit. 58) de l'humanité. || Traiter l'humanité comme une fin (cit. 34). || Culte (cit. 14) de l'humanité. — Les débuts de l'humanité (→ Art, cit. 2). || Passé (→ Affranchir, cit. 18), histoire de l'humanité. ⇒ Civilisation; → Culture, cit. 19. || L'humanité, constante (cit. 5) dans sa nature. || Évolution (cit. 13) de l'humanité. || Perfectionnement, progrès de l'humanité (→ Fataliste, cit. 2). || L'humanité s'est émancipée (cit. 8, Renan). || Civiliser l'humanité (→ Exploiteur, cit. 1). || Les Grecs initiateurs de l'humanité (→ Génie, cit. 14). || Une humanité évoluée (cit. 5), supérieure, meilleure. || L'humanité et la société (→ Édicter, cit. 1). || Gouverner (cit. 32) l'humanité. || L'esclavage (cit. 3), honte de l'humanité. — (Qualifié). || Une humanité misérable (dans cet emploi, le plur. est possible).9 (…) un Prince (Condé) qui a honoré la Maison de France, tout le nom français, son siècle et pour ainsi dire l'humanité tout entière.Bossuet, Oraison funèbre de Louis de Bourbon.10 (…) pour qui sait lire dans l'histoire, se développe cette admirable loi logique qui présente l'humanité tout entière, s'aimant comme un seul être, raisonnant comme un seul esprit, et procédant comme un seul bras, à l'accomplissement de ses actes.Balzac, le Feuilleton, XIX, Œuvres diverses, t. I, p. 394.11 Il faut être optimiste pour l'individu comme pour l'humanité, malgré la perpétuelle opposition des faits isolés.Renan, Souvenirs d'enfance…, Appendice.12 L'humanité homérique, cette humanité dont nous sommes séparés, dans le temps, par une trentaine de siècles, est-elle si différente de nous qu'il nous soit difficile, aujourd'hui de retrouver dans ces peintures quelque chose de consubstantiel et même de fraternel ?G. Duhamel, Refuges de la lecture, I.13 (…) l'humanité a fait ses plus grands changements sans être sûre d'avance qu'elle en tirerait plus de justice et surtout plus de bonheur (…)J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXIV, p. 235.5 N. f. pl. (1671; au sing., 1615, Pasquier; lat. studia humanitatis, déb. XVIe, du lat. class. humanitas « culture »). a Étude de la langue et de la littérature grecques et latines. || Faire ses humanités scolaires. || Les chefs-d'œuvre gréco-latins, fleur des humanités scolaires. ⇒ aussi Humaniste; → Classique, cit. 5; culture, cit. 14.14 Quand j'eus fini mes humanités, mon père me laissa sous la tutelle de monsieur Lepitre : je devais apprendre les mathématiques transcendantes, faire une première année de Droit et commencer de hautes études.Balzac, le Lys dans la vallée, Pl., t. VIII, p. 779.15 Huet, enfant, et déjà poète latin, avait terminé à treize ans le cours de ses humanités (…)Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 3 juin 1850, t. II, p. 169.16 Faut-il rappeler que les « humanités », telles que les ont instituées les Jésuites au XVIIe s, les studia humanitatis, sont les études de ce qu'il y a de plus essentiellement humain (…)Julien Benda, la Trahison des clercs, p. 158, note.16.1 On dit bien « les humanités » pour désigner ce colloque de tous les jours avec les grands ancêtres.Alain, les Passions et la Sagesse, Mars ou la guerre jugée, XCII, Pl., p. 701.16.2 L'affaire du maître, ce n'est pas de dénoncer la barbarie, mais de noter les barbarismes. Il ne faut pas confondre l'humanité avec les humanités.Edmond Gilliard, l'École contre la vie, in Littératures de langue franç. hors de France, p. 549.b Langue et littérature grecques et latines (⇒ Lettre). || L'étude des humanités gréco-latines (→ Éducateur, cit. 2).17 Ils (les médecins) savent la plupart de fort belles humanités, savent parler en beau latin, savent nommer en grec toutes les maladies (…)Molière, le Malade imaginaire, III, 3.18 (…) l'étude des lettres antiques, des humanités, lesquelles comme leur nom le dit, enseignent essentiellement (…) le culte de l'humain sous le mode universel.Julien Benda, la Trahison des clercs, p. 238.c En Belgique, Études secondaires (classiques, modernes ou techniques).❖CONTR. Barbarie, bestialité, brutalité, cruauté, dureté, méchanceté.DÉR. Humanitaire.COMP. Inhumanité, sous-humanité.
Encyclopédie Universelle. 2012.